Luniversitaire, le marchand et le pirate
Luniversitaire, cest Lawrence Lessig, professeur de droit à lUniversité Stanford, et fondateur du Center for Internet and Society. Le marchand, dans ce cas-ci, cest celui qui détient les droits sur un produit commercialisable de création. Le pirate, cest vous et moi qui pouvons nous accaparer de ce produit et du fait même lui nier ses droits. Cette dernière prémisse est, du moins, lattitude quadopte lindustrie de la musique un peu partout, le Québec ny faisant pas exception.
En octobre dernier, lAssociation québécoise de lindustrie du disque, du spectacle et de la vidéo (ADISQ) sengageait à prendre des «mesures concrètes» pour contrer la gratuité «face au phénomène de lappropriation sans droit de la musique (téléchargement illégal sur Internet)», entre autres, «à faire tout en son pouvoir pour que les fournisseurs daccès Internet contribuent financièrement à la création de contenu canadien, contenu dont ils facilitent grandement laccès.» Déjà, il y a problème avec cette formule. Si on force les fournisseurs daccès à contribuer financièrement à la création, ils refileront les coûts à leurs clients, que ces derniers téléchargent ou non des fichiers musicaux. Dans son communiqué sur les statistiques sur le piratage de musique, et sappuyant sur les données de létude NETendances 2003, lADISQ affirmait quau Québec en 2003, «près dun million dadultes ont écouté ou téléchargé de la musique en ligne soit 17 % des adultes québécois. En mars 2003, cette proportion a atteint un sommet de 20 %. De plus, chez les adolescents québécois (12-17 ans) cette proportion a atteint 70 % en 2003.» Cest donc dire quon pénaliserait 80 % des utilisateurs adultes, et 30 % des ados, avec une hausse de tarifs. Et sans compter lensemble des 40 % de branchés québécois qui ne disposent pas dune connexion à haut débit, le poids des fichiers musicaux faisant obstacle à léchange.
Le marchand est plus pragmatique. Une des doléances du public est que lon doive parfois acheter un album complet, même si ce nest quune ou deux chansons qui nous intéressent. Archambault a compris et offre maintenant, à la carte, les pièces individuelles à un dollar. Cette formule est dailleurs retenue par un nombre croissant de disquaires «zéro surface», Wal-Mart sétant joint à iTunes (Apple), Virgin et autres, et une féroce concurrence sannonce.
Luniversitaire, pour sa part, aimerait quon prenne le temps de réfléchir à toute la question des oeuvres dites culturelles. Lawrence Lessig vient de publier un livre, Free Culture, dans lequel il soumet une donnée révélatrice sur lattitude de la Recording Industry Association of America (RIAA) qui mène aux États-Unis la lutte contre le piratage de la musique. «Tenons pour acquis que la RIAA a raison, et que la cause de la diminution de la vente des disques compacts est attribuable à léchange de fichiers sur Internet. Mais voilà où le bât blesse : au cours de la même période durant laquelle la RIAA estime quil sest vendu 830 millions de CD, elle évalue que 2,1 milliards de CD ont été téléchargés gratuitement; bien quil y ait eu 2,6 fois le nombre de CD échangés que vendus, les revenus nont diminué que de 6,7 %. Il y a trop de facteurs qui jouent simultanément pour expliquer de manière formelle ces données, mais on ne peut échapper à une conclusion. Lindustrie de la musique ne cesse de répéter quil ny a pas de différence entre télécharger et voler un CD, mais ses propres données la contredisent. Si je vole un CD, il y a un CD de moins à vendre. Chaque CD volé est une vente perdue. Mais sur la base des données fournies par la RIAA, il est clair quil nen va pas de même pour les téléchargements. Si chaque téléchargement équivalait à un vol [...] lindustrie aurait connu une baisse de ses ventes de 100 % lan dernier, et non de 6,7 %. Si un ratio de 2,6 téléchargements pour chaque vente implique une baisse de 6,7 % des revenus de vente, il y a donc une différence énorme entre télécharger et voler un CD. Ce sont là, peut-être quelque peu exgérés, les torts quon impute au téléchargement, mais tenons-les pour vrais. Quels sont les avantages? Léchange de fichiers peut imposer des coûts à lindustrie de la musique. Mais quelle valeur vient équilibrer ces coûts?» (Op.cit. P.71)
Lessig nous invite à réfléchir non seulement aux statistiques, mais à lessence même de la culture, à ses «produits», à lutilisation que nous en faisons. Et tout comme son titre lindique le livre est téléchargeable gratuitement en format PDF.
En octobre dernier, lAssociation québécoise de lindustrie du disque, du spectacle et de la vidéo (ADISQ) sengageait à prendre des «mesures concrètes» pour contrer la gratuité «face au phénomène de lappropriation sans droit de la musique (téléchargement illégal sur Internet)», entre autres, «à faire tout en son pouvoir pour que les fournisseurs daccès Internet contribuent financièrement à la création de contenu canadien, contenu dont ils facilitent grandement laccès.» Déjà, il y a problème avec cette formule. Si on force les fournisseurs daccès à contribuer financièrement à la création, ils refileront les coûts à leurs clients, que ces derniers téléchargent ou non des fichiers musicaux. Dans son communiqué sur les statistiques sur le piratage de musique, et sappuyant sur les données de létude NETendances 2003, lADISQ affirmait quau Québec en 2003, «près dun million dadultes ont écouté ou téléchargé de la musique en ligne soit 17 % des adultes québécois. En mars 2003, cette proportion a atteint un sommet de 20 %. De plus, chez les adolescents québécois (12-17 ans) cette proportion a atteint 70 % en 2003.» Cest donc dire quon pénaliserait 80 % des utilisateurs adultes, et 30 % des ados, avec une hausse de tarifs. Et sans compter lensemble des 40 % de branchés québécois qui ne disposent pas dune connexion à haut débit, le poids des fichiers musicaux faisant obstacle à léchange.
Le marchand est plus pragmatique. Une des doléances du public est que lon doive parfois acheter un album complet, même si ce nest quune ou deux chansons qui nous intéressent. Archambault a compris et offre maintenant, à la carte, les pièces individuelles à un dollar. Cette formule est dailleurs retenue par un nombre croissant de disquaires «zéro surface», Wal-Mart sétant joint à iTunes (Apple), Virgin et autres, et une féroce concurrence sannonce.
Luniversitaire, pour sa part, aimerait quon prenne le temps de réfléchir à toute la question des oeuvres dites culturelles. Lawrence Lessig vient de publier un livre, Free Culture, dans lequel il soumet une donnée révélatrice sur lattitude de la Recording Industry Association of America (RIAA) qui mène aux États-Unis la lutte contre le piratage de la musique. «Tenons pour acquis que la RIAA a raison, et que la cause de la diminution de la vente des disques compacts est attribuable à léchange de fichiers sur Internet. Mais voilà où le bât blesse : au cours de la même période durant laquelle la RIAA estime quil sest vendu 830 millions de CD, elle évalue que 2,1 milliards de CD ont été téléchargés gratuitement; bien quil y ait eu 2,6 fois le nombre de CD échangés que vendus, les revenus nont diminué que de 6,7 %. Il y a trop de facteurs qui jouent simultanément pour expliquer de manière formelle ces données, mais on ne peut échapper à une conclusion. Lindustrie de la musique ne cesse de répéter quil ny a pas de différence entre télécharger et voler un CD, mais ses propres données la contredisent. Si je vole un CD, il y a un CD de moins à vendre. Chaque CD volé est une vente perdue. Mais sur la base des données fournies par la RIAA, il est clair quil nen va pas de même pour les téléchargements. Si chaque téléchargement équivalait à un vol [...] lindustrie aurait connu une baisse de ses ventes de 100 % lan dernier, et non de 6,7 %. Si un ratio de 2,6 téléchargements pour chaque vente implique une baisse de 6,7 % des revenus de vente, il y a donc une différence énorme entre télécharger et voler un CD. Ce sont là, peut-être quelque peu exgérés, les torts quon impute au téléchargement, mais tenons-les pour vrais. Quels sont les avantages? Léchange de fichiers peut imposer des coûts à lindustrie de la musique. Mais quelle valeur vient équilibrer ces coûts?» (Op.cit. P.71)
Lessig nous invite à réfléchir non seulement aux statistiques, mais à lessence même de la culture, à ses «produits», à lutilisation que nous en faisons. Et tout comme son titre lindique le livre est téléchargeable gratuitement en format PDF.
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