Photo numérique : le grand dérangement

La vente des appareils photo traditionnels ne constitue plus que 1 % du marché, écrit Nadeau, qui poursuit : «Selon une étude du cabinet d'analyses économiques IDC menée à partir des États-Unis, quelque 620 milliards de photos seront prises en 2007 comparativement à 120 milliards en 2003. Chaque mois, toujours selon cette étude, le nombre de photos prises augmente de 18 % à l'échelle planétaire. En moyenne, un utilisateur amateur prend aujourd'hui 75 photos numériques par mois.[...] Un tiers des photographes numériques n'impriment aucune de leurs photos. Seulement 10 % des utilisateurs du numérique impriment toutes les photos qu'ils n'ont pas au préalable jetées par un clic de souris.»
Cest énorme, certes, mais Nadeau brosse aussi un tableau des effets de cette mutation sur de grands noms de la photo (Kodak, Ilford, Leica, Nikon, etc.) et sur certains prétendants au marché (Epson, Sony, Panasonic). Il pose également une question fort pertinente : «Comment se conserveront d'ailleurs ces clichés au fil du temps? Personne ne le sait encore très bien. Alors que la pellicule argentique entreposée dans un environnement normal peut se conserver plus d'un siècle, qui peut dire si un fichier sauvegardé en format jpeg ou en format raw aura une durée de vie aussi grande? Les perpétuelles modifications technologiques et la fragilité des supports informatiques couplées à la nécessité d'énergie rendent suspecte l'espérance de durée de ces nouveaux modes photographiques.»
À cet égard, pour information, jai fait de nombreuses recherches sur la pérennité des modes darchivage sur cédérom pour en conclure deux points essentiels : il faut graver à une vitesse de 4X ou inférieure; il faut graver sur un support de qualité (éviter les CD vierges génériques en aubaine).
En guise de conclusion, Nadeau écrit : «Alors que la photographie argentique était physiquement ancrée dans un territoire et existait formellement quelque part, explique André Rouillé [Ndb. auteur du livre La Photographie, Éditions Gallimard], la photo numérique ne demeure le plus souvent qu'une conjonction mathématique transférable par l'entremise d'Internet partout dans le monde mais dont l'existence physique première n'existe en quelque sorte nulle part. Si la circulation d'une photo n'est plus limitée par sa matière, les frontières du numérique n'en existent pas moins, bien qu'elles semblent encore invisibles à l'oeil de nombre de photographes amateurs.»
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