9.2.05

Daily Kos et le «gannongate»

Quelques développements intéressants dans le «gannongate» (voir Les blogues et l’affaire Wilson/Plame).

Le faux journaliste Jeff Gannon (nom de plume) quitte la fausse agence de presse Talon News, disant que toute l’attention dont il fait l’objet ne lui permet plus de fonctionner adéquatement. Selon la formule consacrée, il entend accorder plus de temps à sa famille.

Les recherches du blogue Daily Kos ont porté fruit, Jeff Gannon serait en fait James D. Guckert, associé à une société nommée Bedrock, et aussi à des noms de domaines de sites pornos gays.

Mais le gros morceau vient de SusanG de Daily Kos qui a obtenu une entrevue très révélatrice avec l’ambassadeur Joseph Wilson, conjoint de Valerie Plame, sur toute l’affaire.

Après les détails politiques, en fin d’entrevue, on aborde le rôle des blogues.

Question : Que pensez-vous du processus de recherche à Daily Kos sur cette affaire? Comment s’inscrit-il dans votre perception du rôle des citoyens par rapport au rôle des médias officiels dans la collecte et la diffusion d’information?

Réponse : Je crois qu’en raison de l’absence de médias nationaux responsables, les blogues jouent un rôle important pour mettre en lumière certaines situations, y compris le bien-fondé de l’accréditation de certains soi-disant correspondants de la Maison-Blanche, et aussi pour traiter de questions ignorées par les journalistes des médias nationaux. Je crois aussi que la nature de la profession a changé, et ce au détriment du journalisme d’enquête. On constate qu’il y a moins de recherche de la vérité, et qu’on se concentre davantage à exposer les deux points de vue sur une situation, même si l’un d’eux est truffé de mensonges et d’aberrations. Quand on accorde autant de poids à la vérité qu’à la fiction, dans l’intérêt de ce qu’on appelle l’équitabilité, on trompe le public et la presse se rend complice de ce jeu.

Mise à jour : 10 février

Le retrait «volontaire» de James D. Guckert, alias Jeff Gannon, de la scène journalistique suscite de nombreux commentaires, à commencer par le principal intéressé qui a accordé une entrevue au Wilmington News Journal, un quotidien de sa ville de résidence. Citation : «Il y a des gens qui se plaisent à bouleverser la vie des autres. Ils on tenté de m’intimider, de me punir, puis de me mettre dans l’embarras, et ils ont bien réussi.»

Timothy Karr, directeur exécutif de MediaChannel.org et de Media for Democracy, écrit sur son blogue Media Citizen : «Il est inutile de fouiller plus à fond la vie privée de Gannon/Guckert. Son orientation sexuelle n’est pas en cause ici, ce qui l’est c’est bien plus la viabilité de notre quatrième pouvoir face à des tentatives croissantes de maquiller la propagande en information crédible.»

Le journaliste Daniel Conover (Conover on Media) examine le rôle des médias traditionnels (MT) dans toute cette histoire : «Le rôle des MT? Pratiquement nul.[...] Il est maintenant clair que les blogues et les sites Web fournissent maintenant l’essentiel de l’information sur les questions qui touchent les MT. Et ceux d’entre nous qui travaillent dans les MT et s’intéressent à ces questions consultons ces sources “non officielles” pour savoir ce qui se passe dans notre industrie, une tendance qui n’est pas près de s’estomper. Et pourtant, le noeud de l’affaire Gannon/Talon est une question à laquelle les MT devraient s’intéresser, soit une opération secrète d’information visant le public, assortie d’un contournement des divers mécanismes de contrôle qui offre à n’importe quelle organisation politique ce dont elle a besoin pour survivre et poursuivre son action : la possibilité de tout nier.»

Le Washington Post est toutefois là pour le post-mortem. On y cite Glenn Reynolds (Instapundit), bien connu pour ses opinions de droite, qui qualifie de «méprisables» les «tactiques» utilisées par certains blogues pour exposer Gannon/Guckert. On y rappelle également la mission auto-proclamée de Gannon/Guckert, qui était selon ses dire «d’exposer les mensonges des libéraux claironnés par les médias, Hollywood, les syndicats d’enseignants et le Parti démocrate.»
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